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L’évolution des DJs
Calvin Harris, David Guetta et même Paris Hilton, ces noms reviennent très souvent dans la liste des artistes les plus payés pour une soirée. Ils ne sont pas chanteurs pourtant, mais DJs. Une profession existant depuis la moitié du siècle dernier, mais qui a complètement changé dans le monde actuel. Les DJs d’aujourd’hui ne sont plus seulement derrière le micro d’une radio. La plupart sont les attractions #1 dans une grande partie des festivals d’Europe. Anthem revient aujourd’hui sur l’évolution phénoménale sur ce qui fut durant un court temps le « sous-métier » de l’industrie.
Le poste ingrat ?
Les initiales DJ viennent du terme ‘Disc-Jockey’. Le premier est une référence à la forme des supports CD de l’époque, le second la machine utilisée pour les jouer. Dans les années 1930 il s’agit d’un métier simple, consistant à jouer les disques populaires. Le DJ n’a aucune autorité ni pouvoir sur la sélection des titres joués par la radio. Ce n’est que dans les 40s que certains DJ commencent à devenir réputés. Cette hausse de la notoriété des DJs correspond avec le début de la payola en radios.
L’importance du métier de DJ et sa forme changent à nouveau vers la moitié du siècle. En 1947, la première discothèque (nommée Whiskey à Gogo) ouvre à Paris. Des lieux avec une ambiance musicale existaient déjà, cependant, dans ces lieux on y trouvait des orchestres. Mais le Whiskey à Go-Go utilise un jockey ainsi que des CDs populaires, ce qui créera de la forte demande pour les DJ radios. Ces derniers voient leurs métiers devenir plus polyvalents, au fur et à mesure qu’ils obtiennent un rôle important pour l’industrie.
Un phénomène de la pop culture
C’est durant les années 60 que l’on notera une seconde innovation pour les DJs. Durant cette période, la musique se popularise de plus en plus et nous sommes à l’âge d’or de la disco. Les boîtes de nuits deviennent le business à la mode. Un peu partout en Europe et en Amérique, il y en a de plus en plus. Les 60s voient également arriver le début des nouvelles technologies associées à la production musicale. C’est dans ce climat opportun qu’arrivent les platines de mixage. Considéré avant comme un métier simple, les techniques de mixage se durcissent. Les transitions doivent être ‘Smooth’ comme on dit et les enchaînements bien réfléchis.
Cette popularisation du DJ continuera également durant les 70s où le disco dominera toujours. Cependant, comme tout business, il y a de la concurrence. Cette concurrence arrivera sous la forme de la télévision. En effet, MTV aux USA et TF1 en France comprennent l’importance d’allier musique et danse en direct. Le métier de DJ mue donc une énième fois. Initialement, le concept perturbe les DJs qui ne sont pas censés être vus de tous. Mais le début des années 😯 marque le déclin de la disco contre le Hip-Hop et le rock.
Ironiquement, ces deux styles de musique sont censés utiliser principalement des instruments. Néanmoins, l’amélioration des platines de DJ va permettre de rajouter des sonorités qui incarnent les 80s. Oui on parle bien de la Synthé que l’on retrouve partout dans les albums de Dua Lipa et The Weeknd. Ceci changera la donne pour les DJs. Beaucoup se demandent « pourquoi autant de DJ radios sont associés au Hip-hop ? » Les 80s en sont la cause puisque durant cette période, beaucoup de DJ radios sont également beat maker en rap.
Le début du DJ Moderne
Avec les années 1990, vient le vent de la house music. Très européen, on voit se dissocier ce prisme qu’était l’univers des DJs. Alors qu’en Amérique les DJs sont soit des animateurs radios ou des beatmakers, en Europe les premiers DJ « artistes » apparaissent. L’évolution est phénoménale en Europe où justement ces derniers ne viennent jouer que quelques CDs. Nous avons désormais des artistes avec une réelle identité. Certes, la plupart utilisent des chansons populaires, mais ils mixent ces hits à leurs styles.
La majorité des tubes eurodance des 90s ne viennent pas de popstars ayant posé sur le dernier DJ en vogue, mais bien d’un DJ qui a entièrement créé une production, à laquelle il a ajouté la voix (le plus souvent d’un chanteur sans notoriété). Nous sommes donc bien loin des Disc Jockey jouant les hits locaux pour la radio de la région. En France, Radio FG (qui a eu pendant longtemps des difficultés) devient une des chaînes de radios #1 du pays. Un exploit conséquent pour une radio ne jouant qu’un style autre que le rock ou la pop.
Avec les années 2000, la technologie et l’invention du format digital (mp3), les DJs font désormais parti du paysage musical des leaders. En 2005, les Grammy Awards ajoutent la catégorie de Meilleur Album Electronic/Dance. À cette période, l’Europe voit apparaître un grand nombre de DJ artistes. La plupart existent depuis les 90s, mais il faudra encore attendre la décennie d’après pour pouvoir aisément les vendre au public. David Guetta, Bob Sinclar et les Daft Punk dominent largement ce marché. As-tu remarqué ? Les DJs utilisent désormais un nom de scène et non plus le préfixe DJ !
Cependant l’Amérique reste hermétique …
À cette époque nous pouvons compter sur les doigts de la main les DJs (désormais considérés comme artistes/groupes électroniques) ayant réussi à faire carrière sur le continent Américain. Alors que le groupe Jamiroquai donne un élan d’espoir en 1997, c’est finalement Daft Punk qui arrivera à se faire une place convenable sur ce marché. Le duo français surprend par un mix en incarnant le DJ classique, c.a.d celui dont on ne voit pas le visage. De l’autre côté, il s’agit d’un groupe ayant une réelle identité via des personnages animés. Le storytelling séduit petit à petit l’Amérique. C’est cependant David Guetta qui sera le premier à atteindre des scores impressionnants au début du siècle dernier. À l’aide de son album ‘Nothing But The Beat‘ il s’impose sur le marché américain et devient un des producteurs les plus demandés.
Les multi-business des DJs
Désormais, la porte d’accès est complètement ouverte. Le britannique Calvin Harris arrive à s’imposer avec le hit ‘We Found Love‘ de Rihanna. En 2017, les américains Chainsmokers obtiennent un des plus gros hits de l’histoire musicale avec ‘Closer’. À ce même moment, les DJs deviennent les invités VIP de tous les festivals mondiaux. Mieux, certains obtiennent une ‘residency‘ (= Un concert fixe) à Las Vegas. Les Chainsmokers ont très rapidement signé un contrat de 3 ans avec une boite de nuit où ils sont payés 200,000$ par show. Et oui 50 ans après la hausse de la demande des DJs, ces derniers touchent autant que les artistes qu’ils jouaient en radios.

David Becker/Getty Images pour Wynn Las Vegas
Les premières plateformes de streaming ont eu un rôle crucial dans la digitalisation de la musique, c’est pourquoi elles restent des plateformes dont l’algorithme favorise les DJs. DJ Snake a ainsi réussi à avoir 2 titres à plus d’un milliard de streams sur Spotify, un exploit que certains n’arrivent même pas à réaliser une seule fois.
Sur 2019, les 17 DJs les plus payés ont cumulé un total de 360 millions $ en revenus, soit une moyenne de 21 millions par artiste/groupe. Ces sommes viennent notamment de la diversification de leurs revenus. Comme nous vous l’avions évoqué dans un de nos You Need To Know, les jeux vidéos sont devenus un business lucratif. Le DJ Marshmello a un contrat le liant au jeu Fortnite, où il donne des concerts lives. Les musiques de ces jeux sont également une source de revenus importants, toutefois les concerts restent le pactole le plus conséquent.
Dans une ère où l’avenir des concerts est toujours en suspens, penses-tu que le métier des DJs va souffrir ?